Les logements des passagers du Titanic

L'un des objectifs de la White Star Line était, en construisant les navires de classe Olympic, de rendre le confort des logements des passagers supérieur à tout ce qui pouvait exister auparavant sur mer. Le Titanic disposait donc d'emménagements qui lui conféraient un luxe et un prestige jusqu'alors inégalés.

Trois classes d'installations étaient proposées aux passagers, parmi lesquelles il choisissaient en fonction de leur situation sociale et de leurs possibilités financières: de la 1^ère Classe pour les plus fortunés à la 3^ème Classe pour les plus modestes.

Les logements des passagers peuvent catégorisés, selon la classe à laquelle ils appartenaient, en appartements avec promenade, suites, cabines et dortoirs (termes que l'on retrouvera dans la suite du document).

Leur numérotation comportait une lettre de l'alphabet indiquant le pont d'appartenance, suivie d'un nombre indiquant le numéro du logement sur le pont: nombre pair pour un logement situé à bâbord, impair pour un logement situé à tribord (exemple: cabine B57 située à tribord sur le pont B).
A noter qu'il n'existait sur le Titanic aucun logement portant le numéro 13, superstition oblige ...

Le nombre et la répartition des logements qui sont donnés ici sont ceux correspondant aux plans initiaux de l'Olympic et du Titanic. Ces données furent cependant légèrement modifiées sur les plans finaux du Titanic et même très peu de temps avant son départ. En effet, pour offrir un confort encore supérieur et selon les besoins des passagers, des logements furent étendus et d'autres, conçus pour être communicants, furent regroupés pour constituer des appartements ou des suites. Les recenser avec exactitude dans leur configuration au jour du départ du Titanic n'apporterait qu'un faible intérêt: les ordres de grandeur seraient conservés et les descriptions peu affectées.

En s'en tenant donc aux données datées de Juin 1911, telles qu'elles furent publiées par le magazine "The Shipbuilder" dans son édition spéciale de l'été 1911, on remarque les caractéristiques suivantes:

• Il n'existait des logements individuels qu'en 1^ère Classe,
• Pour chaque classe, les logements étaient répartis sur plusieurs ponts (4 ou 5 ponts),
• Plus la classe était modeste (de la 1^ère à la 3^ème), plus les logements étaient répartis sur les ponts inférieurs (de A à G, en allant vers le fond du navire),
• Plus la classe était modeste, plus le nombre d'occupants par logement était grand,
• Une partie des logements de 3^ème Classe était constituée de dortoirs (généralement destinés aux émigrants).

Pour chacune des 3 classes d'installations, on trouvera plus loin une description succincte des types de logements qu'elle comprenait, des illustrations caractéristique et un exemple d'implantation (extrait du magazine "The Shipbuilder").

1^ère Classe

Les appartements, suites et cabines de 1^ère Classe n'avaient rien à envier à ce que les passagers pouvaient trouver de plus somptueux dans les plus grands hôtels. En outre, les passagers avaient la possibilité d'être accompagnés, dans leur propre logement, de leurs domestiques personnels.

Certaines cabines situées sur le pont A ne furent installées qu'au dernier moment et leurs occupants eurent d'ailleurs des difficultés à les trouver.
Ces modifications, qui n'apparaissaient pas encore sur les plans des cabines à une date aussi tardive que Janvier 1912, incluaient également le fermeture du pont promenade A, à l'avant.

Implantation des cabines de 1^ère Classe à l'avant du pont C
(les chiffres indiquent le nombre d'occupants)

Il existait sur les ponts B et C des cabines communicantes pouvant être adaptées pour constituer des suites regroupant 2, 3 cabines ou plus, possédant chambres et salle de bains. Luxueusement décorées en style d'époque avec des boiseries et les plus beaux meubles de chêne et d'acajou, ces installations correspondaient parfaitement à la préférence bien connue que la White Star Line accordait au confort.

Cabine "simple" de 1^ère Classe B21

Parmi les installations du pont B, 28 somptueuses suites étaient situées au centre du navire, entre les deux escaliers, là où les mouvements du paquebot étaient les moins perceptibles.
Donnant sur la mer, elles étaient dotées de véritables baies vitrées remplaçant les habituels hublots.
Leurs aménagements comprenaient salle de bains, garde-robe et toilettes particulières, mais le plus remarquable était incontestablement leur décoration en styles différents: Renaissance Italienne, Adams, Georgien, Queen Anne, Louis XIV, Louis XV, Louis XVI, Régence, Empire, Hollandais Ancien et Hollandais Moderne. Quelques exemples de ces magnifiques suites font l'objet d'illustrations dans une galerie de photographies.

Suite de 1^ère Classe B60 (style Georgien)

Sur le pont B, deux appartements exceptionnels avec promenade privée à colombages, à la mode élizabéthaine, étaient situés à proximité du Grand Escalier avant de 1^ère Classe. Pour savoir de quels aménagements bénéficiaient ces suites extraordinaires et qui étaient leurs occupants, consulter la page Les suites des millionnaires.

Toutes les autres cabines étaient néanmoins très confortables sinon luxueuses et surpassaient les cabines similaires se trouvant sur les autres transatlantiques.
Les cabines individuelles étaient équipées d'un lit à pieds, d'un canapé, d'une garde-robe, d'une coiffeuse et d'un lavabo.

En aucun cas, il n'était prévu plus de 3 passagers par cabine simple et loger ensemble davantage de passagers impliquait de regrouper plusieurs cabines communicantes.

Comme sur la plupart des navires de transport de passagers de l'époque, les lits des cabines de 1^ère Classe du Titanic étaient orientés avant-arrière: c'est en effet dans ce sens que les mouvements du navire sont les moins perceptibles.

Le prix d'un billet de 1^ère Classe était d'environ 30 £ (ou 150 $) de l'époque mais pouvait d'élever à 870 £ (ou 3500 $) dans le cas des appartements avec promenade. 325 passagers de 1^ère Classe effectuaient la traversée transatlantique.

2^ème Classe

Les cabines de 2^ème Classe, situées principalement à l'arrière du navire sur les ponts D à G, rivalisaient avec les installations de 1^ère Classe de presque tous les autres paquebots de l'époque et, quoique moins luxeuses, leur confort était à peine inférieur à celui des cabines "ordinaires" de 1^ère Classe du Titanic.

Implantation des cabines de 2^ème Classe à l'arrière du pont D
(les chiffres indiquent le nombre d'occupants)

Les cabines à 2, 3 ou 4 lits ou couchettes, bien éclairées, un grand nombre d'entre elles donnant sur l'extérieur, possédaient des cloisons recouvertes de peinture laquée blanche. Chaque cabine était meublée avec goût de meubles en acajou, de couchettes supérieures et inférieures confortables et de canapés-lits pouvant être utilisés comme couchette supplémentaire en cas de besoin. Le sol était recouvert de carreaux de linoléum.
Les cabines à 2 lits situées sur le flanc du paquebot étaient équipées d'un double lavabo avec dessus de marbre, d'un hublot d'aération et d'un radiateur électrique de chauffage.

Cabine de 2^ème Classe sur le pont E

Le prix d'un billet de 2^ème Classe était d'environ 12 £ (ou 65 $) de l'époque. 285 passagers de 2^ème Classe effectuaient la traversée transatlantique.

3^ème Classe

L'entrepont, qui constituait la classe inférieure à bord des autres paquebots de moindre luxe, correspondait à la 3^ème Classe à bord du Titanic.
Parler de 3^ème Classe était certes moins péjoratif que de parler d'entrepont.

Bien inférieur à celui des deux autres classes, le confort accordé aux passagers de 3^ème Classe du Titanic était cependant supérieur à celui dont les passagers de 1^ère Classe bénéficiaient avant le grand développement du transport maritime de passagers dont la White Star Line était précurseur.

Les 222 cabines de 3^ème Classe étaient situées sur les ponts inférieurs du paquebot, du pont D au pont G, à l'avant et à l'arrière (c'est là que l'amplitude du tangage était la plus importante).

Implantation des cabines de 3^ème Classe à l'avant du pont F
(les chiffres indiquent le nombre d'occupants)

Les installations comprenaient des cabines permanentes ou mobiles de 2 à 10 couchettes ainsi que des dortoirs.
Elles étaient occupées par une majorité d'émigrants, principalement originaires du Royaume Uni, des Pays Scandinaves, de l'Est, de la Méditerranée et du Moyen-Orient.
A titre d'exemple, la plus grande famille d'émigrants se trouvant à bord était la famille anglaise Sage, composée des parents et de leurs 9 enfants (tous furent victimes du naufrage).
A l'exception des jeunes enfants accompagnés de leurs parents, les adolescents et adultes célibataires étaient séparés sur l'ensemble du navire: les hommes logeaient à la proue et les femmes, à la poupe.

Presque toutes les cabines permanentes de 3^ème Classe des ponts D, E et F, possédaient des cloisons recouvertes de panneaux de pin et un sol de "veitchi", bien loin du métal à nu des parois et sols des paquebots antérieurs (et même de l'époque).

Cabine de 3^ème Classe à 2 couchettes

Certaines cabines doubles étaient équipées de couchettes fixes et possédaient un lavabo renversable, pour l'évacuation des eaux, ainsi qu'un ventilateur de plafond.
D'autres, plus modestes, disposaient de couchettes repliables, ce qui permettait d'en augmenter l'espace disponible pendant la journée.

Cabine de 3^ème Classe à 2 couchettes repliables

Le Titanic n'était pas conçu pour transporter des émigrants en grand nombre et, pour cette raison, il n'existait qu'un secteur de dortoirs, à l'avant du pont G. Plusieurs paquebots de l'époque conservaient toujours ce type d'espaces pour les couchettes des émigrants mais ceux-ci ne furent pas utilisés pendant la traversée transatlantique du Titanic.

On trouvait aussi, et pas seulement sur les navires de la White Star Line, un aménagement constitué de cabines mobiles. Un secteur du pont G, à l'avant, était réservé à ces cabines mobiles dont les cloisons démontables en acier délimitaient des espaces variables selon le nombre de passagers de 3^ème Classe à héberger. Situé non loin du mécanisme de gouvernail, l'espace était réduit et les mouvements du navire, qui étaient là les plus sensibles, risquaient de provoquer le mal de mer aux passagers.

Le prix d'une couchette de 3^ème Classe variait de 3 à 8 £ (ou de 15 à 40 $) de l'époque. 706 passagers de 3^ème Classe effectuaient la traversée transatlantique.

L'accès des passagers de 3^ème Classe aux installations réservées aux autres classes était interdit par des grilles fermées à clé, dont la présence était imposée par les lois américaines sur l'immigration, dans le but de maîtriser le flux des maladies entrant aux Etats-Unis.
Au moment du naufrage, ces grilles se révèlèrent être une des causes de décès: de nombreux passagers de 3^ème Classe, ne pouvant s'échapper, périrent (75% des passagers de 3^ème Classe furent au nombre des victimes).

Récapitulatif

Au cours de la traversée transatlantique, le nombre total de passagers était de 1316, ce qui montre que le navire n'était globalement qu'à 54% de sa capacité d'accueil, c'est à dire à moitié plein.
A noter que, parallèlement, le personnel de bord était, à quelques unités près, au maximum de sa capacité de 900 membres.