Les victimes du Titanic et la science
ou
Le mystère de l'enfant inconnu

 

En 2002, près de 90 ans après le naufrage et pour la première fois dans l'histoire du Titanic, la science fut utilisée comme ultime recours pour identifier des victimes de la tragédie.

Malgré les motivations des familles de plusieurs disparus et les multiples précautions prises tout au long du processus de recherche d'identité, les faits énoncés ci-après, tels qu'ils ont été relatés par la presse, suscitent néanmoins des réflexions d'ordre éthique, en particulier sur les notions de repos dû aux victimes et de respect de leur mémoire.

Il appartient à chacun d'apprécier en conscience le bien fondé d'une telle démarche qui permit d'aboutir à une surprenante conclusion.

 

Les thèmes ...

Rappel
Les motivations des familles
Le projet de recherche d'identité
Les victimes exhumées
Les exhumations partielles
Les résultats préliminaires
Explications
Coup de théâtre
Et maintenant ...
Commentaire
Conclusion
Les petits souliers
Ultime (?) rebondissement
La famille Rice
La famille Danbom
La famille Panula
La famille Goodwin

 

 

 Rappel

Après le naufrage du Titanic, le 15 Avril 1912, 4 navires (les Mackay-Bennett, Minia, Montmagny et Algerine), affrétés par la compagnie maritime White Star Line, participèrent à une campagne de recherche des passagers et membres d'équipage disparus, sur une période de 6 semaines.
Parmi les 328 corps qu'ils retrouvèrent, 119 se trouvaient en état de décomposition avancée et durent être rejetés à la mer, 59 furent identifiés et rendus à leurs familles qui les avaient réclamés, tandis que 150 autres furent inhumés dans les 3 cimetières de Halifax, Nouvelle-Écosse, Canada (cimetières de Fairview Lawn, Mont des Oliviers, et Baron de Hirsch).
Parmi ces derniers, 107 étaient également identifiés mais non réclamés par les familles, et 43 demeurèrent inconnus.
L'objet de cette page porte sur la recherche d'identité de 3 des 43 victimes non identifiées.

 Les motivations des familles

Pour de nombreuses personnes, les pertes humaines subies lors du naufrage du Titanic demeurent, aujourd'hui encore, vivement et intimement ressenties.
Tels sont notamment les sentiments des 2
ème et 3ème générations de particuliers et de familles qui ont perdu un parent au cours de la nuit tragique du 14 au 15 Avril 1912.

Au cours des dernières années, plusieurs familles de victimes engagèrent des recherches afin de retrouver la sépulture d'un parent disparu dans la tragédie.
3 familles ne purent malheureusement trouver une sépulture au nom de leur parent disparu et se heurtèrent à l'anonymat des tombes, en particulier dans la section
Titanic du cimetière de Fairview Lawn à Halifax (sur 121 tombes, 31 sont anonymes).

Chacune de ces familles, malgré les intenses recherches généalogiques effectuées, avait l'intime conviction que le corps du parent qu'elles recherchait se trouvait dans l'une des tombes du cimetière de Fairview Lawn: la tombe portant le numéro associé à la description du corps non identifié retrouvé en mer et à celle des objets personnels qu'il portait, et dont elle était convaincue qu'elles correspondait à celle concernant le corps de leur parent.

Désirant "mettre fin à un mystère tenace", ou souhaitant que leur parent catholique se trouvant probablement inhumé dans un cimetière protestant puisse enfin bénéficier des sacrements qui lui sont dus, ou, pour une personne devenue orpheline suite au naufrage et désormais grand-mère, apaiser la profonde affection qui la rongea toute son existence, ou encore, mettre enfin un nom sur la tombe, les familles durent se résoudre au fait que l'analyse d'ADN était leur seul espoir et leur dernier recours pour identifier leur parent en confirmant leur lien de parenté avec la victime.

 Le projet de recherche d'identité

3 familles canadienne, anglaise et suédoise, sans lien de parenté entre elles, manifestèrent donc leur souhait d'identifier un parent disparu.

Le projet d'identification commença en 1998 lorsqu'un ecclésiastique prit contact avec les autorités de Halifax pour le compte d'une famille qui pensait que l'une des tombes contenait le corps d'un parent. La ville refusa la demande de graver un nom sur la pierre tombale, estimant que les preuves qu'elle apportait n'étaient pas suffisamment convaincantes.

Les arguments du prêtre bénéficièrent cependant d'une écoute compréhensive de la part des scientifiques canadiens (notamment le Dr. Ryan Parr, co-directeur du Laboratoire Paléo-ADN de l'Université Lakehead, à Thunder Bay, Ontario) qui proposèrent d'effectuer des tests d'ADN sur les restes, la technologie et les techniques d'analyse ayant déjà démontré leur fiabilité.

Cette recherche d'identité par analyse d'ADN fit ainsi l'objet d'un projet scientifique médico-légal s'étalant sur 4 ans et auquel participa une équipe de chercheurs du nord de l'Ontario, au Canada.

Le projet ne fut entrepris qu'après consultation approfondie des familles des victimes. Les chercheurs s'assurèrent que ces familles souhaitaient ardemment pouvoir confirmer, par l'exhumation et l'analyse mitochondriale de l'ADN, leurs liens de parenté avec les victimes non identifiées, et que l'établissement de leur identité revêtait pour elles une grande importance afin de pouvoir ainsi restituer les liens qu'elles cherchaient depuis près d'un siècle.

L'équipe de chercheurs était composée de:

  MM. Ryan Parr (Responsable du projet) et El Molto, directeurs du Laboratoire de Paléo-ADN de l'Université Lakehead, à Thunder Bay, Ontario
  M. Alan Ruffman, président de Geomarine Associates Ltd (Consultant en géoscience, spécialisé dans la géologie marine et pétrolière et la géophysique), à Halifax, expert local du Titanic, membre de la Titanic Historical Society, et auteur du livre "Titanic Remembered: The Unsinkable Ship and Halifax"

 


L'Université Lakehead, à Thunder Bay, Ontario

 

Le projet scientifique prévoyait les exhumations partielles des restes d'une femme d'une trentaine d'années, d'un jeune homme d'une vingtaine d'années et d'un bambin de 2 ans, dont les tombes, dans le cimetière de Fairview Lawn à Halifax, Nouvelle-Écosse, sont simplement gravées respectivement N° 281, N° 240 et N° 4, afin de tenter de faire correspondre des fragments d'os avec des prélèvements sanguins effectués sur des membres des familles à l'initiative du projet. Pour ces 3 cas, les responsables du projet estimaient qu'il existait une "chance raisonnable" de pouvoir effectuer les identifications.

Le travail de recherche fut suivi par le Bureau d'Éthique de la Recherche de l'Université Lakehead afin de s'assurer qu'il était conforme à l'Énoncé de la Politique des 3 Conseils de 1998 sur "L'Éthique de la Recherche avec des Êtres Humains" et le supplément de 1999: "Procédures d'Éthique et Lignes Directrices pour la Recherche avec des Êtres Humains".
De plus, il fut décidé d'obtenir des Certificats de Comportement Éthique concernant les parents vivants.

Basé sur la vérification minutieuse des registres du Coroner établis en 1912 et conservés par les Archives Publiques de Nouvelle-Écosse, ainsi que sur la recherche conjointe menée par des membres des familles et l'équipe de chercheurs, une exhumation partielle visant à effectuer des prélèvements fut ordonnée pour les 3 tombes: N° 4, N° 240 et N° 281.

Dans tous les aspects du projet, y compris les exhumations partielles, l'équipe de chercheurs s'engagea à respecter les souhaits d'anonymat des particuliers et des familles.
"La possible confirmation de l'identité de ces victimes est très importante pour ceux qui souhaitent élucider un aspect de l'histoire de leurs familles respectives, qui leur a échappé pendant près d'un siècle" déclarèrent les chercheurs.

Applied Biosystems (société développant et commercialisant des systèmes à base d'instruments, des réactifs et des logiciels, et proposant ses services à l'industrie des sciences de la vie et au milieu de la recherche) et le fonds du Patrimoine du Nord de l'Ontario couvrit une grande partie des dépenses du projet.

Le Dr. Parr passa environ 18 mois à rechercher les tombes avec les familles et ses partenaires du projet, le Dr. Scott Fairgrieve et M. Alan Ruffman. Leurs recherches les conduisirent effectivement face à l'anonymat des tombes de Halifax.

La réalisation du projet nécessita l'obtention d'une autorisation de la part des autorités médicales canadiennes.
L'ensemble des données recueillies par les chercheurs fut transmis au Dr. Robert Strang, Officier Médical de Santé, Capitale Régionale de la Santé, Province de Nouvelle-Écosse, pour approbation de chacune des 3 exhumations partielles.
Fin 1999, le Dr. Robert Strang reçut la visite des familles qui lui exposèrent leurs motivations. Il leur demanda de motiver par écrit leur demande de recherche d'identité et de donner leur accord formel sur le processus d'exhumation.
Il s'assura, en outre, que le projet à l'initiative des familles était abordé du point du vue de la recherche proprement dite, et non dans un but lucratif ou publicitaire sous le prétexte historique du
Titanic.

Lorsque tous les éléments nécessaires furent réunis, le Dr. Robert Strang donna son accord et l'ordre de procéder aux exhumations partielles, à condition que la dignité des restes des victimes autant que celle du cimetière de Fairview Lawn soient respectées. Une fois les prélèvements effectués sur les corps des victimes, les tombes devaient être refermées.

Le projet prévoyait que les résultats seraient communiqués aux familles et, avec leur permission, présentées en conférences universitaires et publiés dans des revues scientifiques. La communication des résultats à la communauté scientifique, aux médias et au public serait faite de manière à préserver l'anonymat des familles des défunts.

Bien qu'une analyse d'ADN fut capable d'apporter la preuve ultime de l'identité des victimes, les scientifiques exploitèrent tous les indices connus ou auparavant découverts par les familles. Tel fut le cas, pour l'inconnu de la tombe N° 240 sur lequel on avait trouvé, lorsque son corps fut repêché après le naufrage, une montre de gousset dont la clé, gravée, portait l'inscription "Panny, 2 Richmond Street, Brighton".

Le Dr. Scott Fairgrieve, convaincu que l'inconnu de cette tombe était un Anglais, se rendit ainsi en Avril 2001 dans un cimetière près de Brighton, en Angleterre. Ayant reçu les autorisations nécessaires, il préleva des échantillons osseux sur les restes d'un homme décédé en Angleterre vers 1932 dont il supposait que l'inconnu de Halifax était le fils.
Il put obtenir, de la part de la famille, une photographie du "fils" afin de la comparer au cliché de la victime pris lors de sa mise en bière avant son inhumation à Halifax.

 Les victimes exhumées

On trouvera ci-après les photographies des 3 tombes concernées par l'exhumation ainsi que la description des corps et des objets personnels qu'ils portaient lorsqu'ils furent retrouvés par le Mackay-Bennett.

 

Tombe N° 240   Tombe N° 4   Tombe N° 281
   
Description
de la victime
  Description
de la victime
  Description
de la victime
N° 240

Homme - Âge estimé: 24 ans - Taille: ....... - Poids: 63 kg - Cheveux: châtain-roux - Signes: aucun.

Portait pardessus gris; costume de serge bleue et tricot blanc.

Effets comprenant une pipe; bourse en nickel ou argent pour pièces; croix de Malte en argent du Couronnement de Edouard VII, 1902, attachée à une chaîne de montre; montre en argent contenant 3 photographies (au dos) de 2 femmes et un garçon portant casquette; fabricant de la montre "J. B. Yabsley, 72 Ludgate Hill, Londres"; clé de montre attachée à la chaîne et gravée "Panny, 2 Richmond Street, Brighton".

  N° 4

Masculin - Âge estimé: 2 ans - Cheveux: blond.

Manteau gris avec col et poignets de fourrure - Robe de serge marron - Jupon - Vêtement de flanelle - Tricot de corps en laine rose - Souliers et chaussettes marron.

Pas de signe particulier.

Probablement 3ème Classe.

  N° 281

Femme - Âge estimé: 35 ans - Taille: 1 m 62 - Poids: 79 kg - Cheveux: châtain clair - Signes: Grosse verrue à l'index de la main gauche.

Portait manteau noir; robe bleue; tricot rouge; corsage vert; tricot de corps en laine; jupon gris; bottines noires et bas.

Pas d'autres signes distinctifs.

 

Lorsqu'il découvrit le corps du bambin d'environ 2 ans, au petit matin du Dimanche 21 Avril 1912, l'équipage du Mackay-Bennett fut profondément touché. Ce fut le seul enfant retrouvé durant les opérations de recherche.

Le petit garçon, non réclamé et apparemment oublié, devait être enterré, tous les efforts d'identification ayant échoué. Cette triste situation avait ému tant de gens que la White Star Line et les autorités provinciales furent inondées d'offres pour prendre en charge l'enterrement du petit bonhomme. La décision fut facilitée par la demande du Capitaine F. H. Larnder et de l'équipage du Mackay-Bennett qui avaient trouvé le corps du bambin, de prendre la responsabilité des obsèques. Cette requête fut acceptée.

Lors des cérémonies d'inhumation, 6 marins du Mackay-Bennett portèrent le petit cercueil blanc couvert de fleurs jusqu'au corbillard qui conduisit l'enfant à sa dernière demeure, dans le cimetière de Fairview Lawn. Le Capitaine Larnder et son équipage payèrent eux-mêmes l'élévation d'une stèle plus grande que la plupart des autres et qui porte l'inscription suivante:

 

 

Erigé à la mémoire d'un enfant inconnu dont la dépouille fut recueillie après la catastrophe du Titanic.
15 Avril 1912.

 

Les registres du Coroner de Halifax ainsi que les listes de la White Star Line supposent que l'enfant inconnu serait le "bébé Pålsson", c'est à dire Gösta Leonard Pålsson, enfant suédois âgé de 2 ans et 3 mois 1/2 au moment du naufrage.

Nota: La page "Les cimetières de Halifax" décrit comment fut retrouvée une partie des victimes du naufrage, ainsi que les cimetières où certaines victimes reposent aujourd'hui. On y retrouve, entre autres, la description de la tombe de "l'enfant inconnu".

 Les exhumations partielles

Les exhumations partielles se déroulèrent les 17 et 18 Mai 2001, dans le cimetière de Fairview Lawn, à Halifax, et durèrent 29 heures.

La Municipalité Régionale de Halifax, en tant que propriétaire du cimetière de Fairview Lawn, exécuta l'ordre d'exhumation donné par le Dr. Robert Strang et les tombes furent ouvertes puis refermées par le personnel du cimetière. Elle s'assura qu'il était procédé à l'ouverture et à la fermeture correcte des tombes et que tous les protocoles correspondants étaient respectés.

Selon le projet, le secteur des tombes fut protégé d'une toile de tente blanche pendant les exhumations partielles et les prélèvements, afin de préserver la dignité des tombes et celle du cimetière. Les familles assistant à l'exhumation souhaitèrent rester anonymes.
Afin que les exhumations puissent se dérouler à l'abri des regards du public, la police mit en place un service de sécurité qui resta sur le site jusqu'à ce que les tombes soient refermées.

Après que l'assistance eut observé une minute de silence à la mémoire des victimes, M. Fairgrieve, Mme Tracy Oost et les employés du cimetière de Fairview procédèrent à l'exhumation partielle des 3 corps ainsi qu'au prélèvement d'échantillons de tissus pour l'analyse de l'ADN. Les corps ne furent en aucun cas complètement retirés des tombes.

Un minuscule morceau d'os (6 cm) fut notamment prélevé dans la tombe de l'enfant afin d'être ensuite réduit en poudre pour permettre aux scientifiques d'en extraire l'ADN, ainsi que 3 dents destinées à une expertise dentaire. Il s'agissait des seuls restes de la dépouille de l'enfant.

 


Recueillement des chercheurs avant l'exhumation
(Alan Ruffman est la 4
ème personne à partir de la droite)

 

Alan Ruffman déclara par la suite que les chercheurs crurent d'abord que les 3 tombes étaient en bon état en raison de la protection d'un cercueil.
Mais dès que les cercueils furent retirés, ils réalisèrent que des infiltrations d'eau avaient endommagé les restes.
"La partie basse du cimetière de Fairview Lawn, où est située la section
Titanic, est une zone très humide et l'est probablement restée depuis 1912", commenta Alan Ruffman.

Les échantillons prélevés furent remis à MM. Parr et Molto, en charge d'effectuer l'analyse mitochondriale de l'ADN, et les dépouilles furent inhumées de nouveau dans leurs tombes.

De nombreux médias nationaux, régionaux et locaux se trouvèrent sur place pour relater l'événement qui fut également rapporté par la presse internationale (voir l'article du Belfast Telegraph).

 Les résultats préliminaires

Le 19 Mai 2001, lendemain des exhumations partielles, les chercheurs de l'Université Lakehead où les tests devaient être effectués, durent malheureusement se résoudre à faire la déclaration suivante: "Les restes extraits des tombes ne sont pas de nature à satisfaire à une analyse d'ADN".
Le projet était sur le point d'échouer.

"C'était impossible", déclara Nancy Angus de l'Université Lakehead. "Il était important de faire savoir immédiatement aux familles qu'aucun espoir n'était fondé". Elle ajouta: "Tout le monde savait depuis le début qu'il existait un risque de ne pouvoir effectuer l'analyse d'ADN".

Pour les victimes inhumées dans les tombes N° 240 et N° 281, toute identification était définitivement impossible.
"Cependant, les chercheurs espéraient quand même que les prélèvements effectués dans la tombe N° 4, celle du bambin de 2 ans, pouvaient conduire à son identification" déclara Alan Ruffman.
Il ajouta que les familles informées des résultats décevants avaient été néanmoins satisfaites de savoir que tous les efforts nécessaires avaient été faits.

Le 10 Août 2001, 3 mois après l'exhumation, Alan Ruffman annonça que l'analyse d'ADN effectuée sur les restes du bambin démontrait, avec une fiabilité de 99%, qu'il s'agissait du petit Eugene Rice, 2 ans 1/2, passager de 3ème Classe.
En tout cas, il ne pouvait s'agir du petit Gösta Leonard Pålsson.

 

Eugene RICE

 

Des tests complémentaires étaient en cours. Il était prévu que le Dr. Ruffman entrât en relation avec la famille dès qu'il serait définitivement prouvé que l'enfant était bien Eugene Rice.

Margaret Rice, la mère d'Eugene Rice, elle aussi victime du naufrage et dont le Mackay-Bennett retrouva le corps, est inhumée dans un autre cimetière de Halifax, le cimetière catholique du Mont des Oliviers. Sa tombe porte le N° 12.

L'histoire émouvante de la famille Rice, d'origine irlandaise, embarquée à Queenstown pour vivre une nouvelle vie aux États-Unis, est relatée à la fin de ce document.

 Explications

Après que les résultats préliminaires de l'identification de l'enfant inconnu furent révélés, un certain nombre d'informations filtrèrent quant au déroulement du projet d'identification de l'enfant.

On apprit que les familles en recherche d'identification étaient:

On apprit aussi que Alan Ruffman avait fait paraître une annonce dans un journal diffusé dans le comté de Westmeath en Irlande, région d'origine de la famille de Margaret Rice née Norton.

En réponse à cette annonce, Patsy Norton, petite-nièce de Margaret Rice, habitant Iona Park, se présenta et accepta de donner un échantillon de son sang. Ceci constitua un élément capital dans la découverte de l'identité de l'enfant.

Des Norton, 29 ans, habitant Glossop, comté de Derby, en Angleterre, se manifesta également.
Des Norton, qui est un cousin éloigné de la famille de Margaret Rice, ne découvrit le lien de famille qu'au début de l'année 2001.
A l'annonce des résultats d'analyse, il fit le commentaire suivant: "Les tests ont été effectués et le Dr. Ruffman a déclaré qu'avec 99% de certitude, le corps est celui d'Eugene. Mais nous attendons maintenant
un résultat final venant confirmer que les tests sont définitifs".

Et il ajouta: "Si c'est bien le cas, nous nous efforcerons de réunir Eugene et sa mère Margaret et de les faire inhumer dans la même tombe. Ce sera la merveilleuse fin d'un mystère qui n'a pas été résolu pendant longtemps".

 Coup de théâtre

Il semble que, pendant plusieurs mois, les diverses déclarations effectuées ne furent pas démenties, notamment par les responsables du projet de l'Université Lakehead, ce qui contribua à entretenir l'espoir de la famille Rice.
Bien que la fiabilité des premiers résultats fut annoncée comme quasi optimale, il subsistait cependant une infime part de doute ...

C'est alors que, le 3 Mai 2002, contre toute attente, l'Université Lakehead publia, un communiqué ainsi rédigé:

 

"L'identification de «l'Enfant Inconnu» du Titanic se poursuit"

 

"En raison de la nature du sol et des caractéristiques du drainage du cimetière, les restes des tombes N° 240 et N° 281 étaient complètement décomposés, incluant des tissus durs tels qu'os et dents, rendant l'analyse d'ADN impossible. Heureusement, un petit fragment (6 cm) d'os faiblement préservé, ainsi que trois dents, furent retrouvés dans la tombe N° 4, celle de «l'enfant inconnu». Ces quatre éléments étaient les seuls restes humains présents dans la tombe.

L'identification s'est concentrée sur l'ADN non nucléaire connu sous le nom d'ADN mitochondrial (ADNmt), dont nous héritons tous exclusivement de notre mère. Dans cette molécule est inscrit et archivé une «empreinte» biochimique, écrite grâce au simple code à quatre lettres (G,A,T,C) de l'alphabet génétique. Cette empreinte est stable et persiste dans les lignées maternelles des familles pendant de nombreuses générations.

Pour tenter d'identifier «l'enfant inconnu» comme étant Gösta Leonard Pålsson, auquel est associé le plus souvent «l'enfant inconnu», un cousin maternel a été localisé afin de le comparer à l'empreinte biochimique de la tombe N° 4. L'analyse d'ADN mitochondrial a été réalisée au Laboratoire Paléo-ADN de l'Université Lakehead et au Centre Kuvin pour l'Etude des Maladies Infectieuses et Tropicales, ainsi qu'à l'Université Hébraïque de Jérusalem, en Israël. De plus, l'analyse des dents pratiquée par deux experts dentaires différents, confirme que les restes sont ceux d'un enfant âgé de moins d'un an, vraisemblablement d'environ six mois.

Ainsi «l'enfant inconnu» ne peut pas être l'enfant Suédois Gösta Leonard Pålsson, ne peut pas être l'enfant Irlandais Eugene Francis Rice, et ne peut pas être l'enfant Anglais Sidney Leslie Goodwin, tous étant âgés de près de deux ans et passagers de 3ème Classe. Avec l'âge de «l'enfant inconnu» désormais défini comme étant de moins d'un an, la recherche s'est maintenant concentrée sur un enfant Suédois âgé de cinq mois, un enfant Anglais âgé de sept mois et un enfant Finlandais âgé de treize mois. Tous les trois étaient également les enfants de passagers de 3ème Classe.

Le Laboratoire Paléo-ADN de l'Université Lakehead possède l'un des rares équipements au monde capables d'extraire et d'amplifier l'ADN dégradé, à partir d'échantillons anciens. Les restes du Titanic étant en si mauvais état, il est peu probable qu'un autre Laboratoire dans le monde aurait réussi à extraire l'ADN. Des projets tels que celui-ci mettent en valeur la compétence du Laboratoire Paléo-ADN en analyse d'ADN qui est aussi utilisée pour effectuer des travaux médico-légaux.

Dynamique et moderne, l'Université Lakehead jouit d'une réputation mondiale pour ce qui est des programmes novateurs. Plus de 30000 anciens étudiants travaillant autour du monde sont la preuve que ces programmes permettent l'acquisition de diplômes de second et troisième cycles. Lakehead est dotée d'une gamme étendue d'excellents équipements, entretient un esprit collégial et donne aux étudiants un accès facile au corps enseignant et aux services".

 

Toutes les informations connues jusqu'alors furent ainsi remises en cause par les résultats des expertises dentaires et les hypothèses concernant d'abord le petit Gösta Leonard Pålsson (né le 30 Janvier 1910 et âgé de 2 ans et 3 mois 1/2) puis le petit Eugene Rice (né le 13 Octobre 1909 et âgé de 2 ans 1/2), se trouvèrent contredites.
On ne manquera pas de remarquer que le communiqué, s'il indique les résultats des expertises dentaires, ne fait pas état de ceux obtenus grâce à l'analyse d'ADN, contrairement à ce qui était évoqué auparavant.

 

Nota: Il existe deux types d'ADN: l'ADN nucléaire et l'ADN mitochondrial. Les molécules d'ADN mitochondrial sont présentes en centaines de milliers de copies par cellule, tandis que les molécules d'ADN nucléaire ne sont présentes qu'en deux copies par cellule. C'est pour cette raison, ainsi que celle de la décomposition importante des restes durant 90 ans, que l'analyse d'ADN mitochondrial a été choisie. En revanche, ce type d'ADN, qui ne se transmet que par la mère, nécessite donc de retrouver des parentes maternelles afin d'établir des comparaisons.

 Et maintenant ...

Comme l'a alors annoncé l'Université Lakehead, le bambin dont les restes reposent dans la tombe N° 4 du cimetière de Fairview, à Halifax, demeure toujours un "enfant inconnu". On sait, d'autre part, que les analyses précédentes ont été perturbées par des problèmes de contamination.

Les recherches d'identification se poursuivent à partir de nouvelles extractions d'ADN et, compte tenu des informations fournies par le communiqué, "l'enfant inconnu" serait l'une des petites victimes masculines âgées de moins d'un an au moment du naufrage. Il pourrait donc être l'un de ces 3 petits passagers masculins de 3ème Classe encore supposés perdus en mer:

Les chercheurs s'intéressent plus particulièrement au petit Gilbert Sigvard Danbom, né le 16 Novembre 1911 et âgé de 5 mois, qui fut la plus jeune victime masculine (voir La famille Danbom). Ils tentent de reconstituer l'arbre généalogique de la famille Danbom / Brogen (père et mère de l'enfant) en tentant de localiser des descendants maternels directs de la mère de l'enfant, Anna Sigrid Brogen, des tantes, de la grand-mère, ou des grand-tantes.

L'analyse d'ADN mitochondrial est prévue d'être effectuée par comparaison avec 3 personnes distinctes de la branche maternelle, dans 2 laboratoires différents, afin de garantir l'exactitude et la corrélation des résultats.

 Commentaire

La description des vêtements portés par le petit garçon, telle qu'elle figure sur les registres des Archives Publiques de Nouvelle-Écosse, comporte pourtant un détail qui aurait dû retenir l'attention: pour un âge estimé à 2 ans, il était vêtu d'une robe et d'un jupon (frock, petticoat).
Malgré l'époque, il est fort peu probable qu'à 2 ans un garçonnet ait été ainsi habillé.
Cette incohérence entre l'âge et les vêtements aurait dû faire penser depuis des années (personne ne semble avoir soulevé ce point) que l'enfant masculin devait très certainement être beaucoup plus jeune, c'est à dire bébé, pour pouvoir porter de tels vêtements à caractère féminin, comme il était de coutume dans ce cas.

 Conclusion

Le Mercredi 6 Novembre 2002, après 4 années d'efforts et de recherches, le Dr. Ryan Parr maintenant Directeur de la Recherche et du Développement de Genesis Genomics à Thunder Bay, Ontario, et l'historien Alan Ruffman de Geomarine Associates Ltd. de Halifax, annonçaient: "Les tests, terminés le mois dernier, démontrent que l'enfant inconnu est Eino Panula", tout en précisant que si les analyses d'ADN montrent qu'il s'agit bien du petit Panula, elles montrent aussi qu'il ne peut s'agir des autres enfants possibles.

Les analyses avaient enfin rendu leurs conclusions. Comment avait-t-on abouti à cette identification ?

Avec la contribution d'un généalogiste, les registres paroissiaux des églises de Finlande, de Suède, d'Angleterre et des Etats-Unis furent examinés afin de découvrir des parents des enfants susceptibles d'être l'enfant inconnu.
Après avoir procédé par éliminations, les chercheurs finirent par trouver en Finlande une petite-nièce de Maija Emelia Panula née Ketola, la mère du petit Eino Viljami Panula, âgé de 13 mois au moment du naufrage du
Titanic.

La femme qu'ils trouvèrent est Magda Helena Schleifer, 68 ans, employée de banque en retraite, habitant Helsinki, et dont la grand-mère était la sœur de Maija Panula (voir La famille Panula).
Dès qu'elle entendit parler de l'enfant inconnu, elle déclara qu'elle aiderait de tout son mieux, surtout parce que cet enfant avait presque le même âge que sa petite-fille. Les chercheurs lui demandèrent de fournir un échantillon sanguin, ce qu'elle accepta.

Après avoir établi le profil de l'ADN de Magda Schleifer et l'avoir comparé à celui extrait de la pulpe des 3 petites dents et du fragment osseux du poignet (probablement de cubitus) de l'enfant inconnu, long de 6 cm et pesant moins de 7 g, la coïncidence apporta la preuve de leurs origines communes.

 


Opération de prélèvement
sur le fragment d'os

 

Le Dr. Parr indiqua qu'un médaillon de cuivre portant l'inscription "Notre Bébé" avait été placé dans le petit cercueil par les marins du Mackay-Bennett qui avaient découvert le corps, et avait contribué à préserver le fragment d'os de l'oxydation.
Il ajouta: "L'explication sentimentale est que les marins ont éprouvé tant de choses pour ce petit garçon qu'ils lui ont passé un médaillon pour être certains qu'il serait préservé assez longtemps afin que nous le trouvions et l'identifions".

Commentant ses relations avec les familles présumées de la petite victime, il déclara: "C'est un facteur humain. Voir l'enthousiasme de ces familles et être capable d'identifier une partie de leur passé, de leur héritage, de leur histoire, a été véritablement amusant et passionnant. Cela devenait plus important, je pense, que la science".

Lors de la conférence de presse au cours de laquelle il annonça publiquement les résultats, Alan Ruffman déclara: "Nous sommes réellement très, très heureux de partager cela non seulement avec la famille qui est directement concernée, mais avec toutes les autres familles avec lesquelles nous avons travaillé dans le processus d'élimination".

Lorsque la nouvelle de l'identification fut annoncée à Magda Schleifer, elle fit les déclarations suivantes:
"Notre famille a toujours su que notre grand-tante Maija et ses 5 enfants avaient été des victimes. [...] L'identification de Eino fut une grande surprise. Nous pensions que tout le monde avait disparu en mer, et il y a désormais une sépulture qui est nouvelle pour nous et nous y avons là un parent. [...] J'ai d'abord cru que ce ne pouvait être vrai. Ce fut réellement une surprise bouleversante".

 


Magda Schleifer (portant des lunettes),
accompagnée de sa fille et de sa petite-fille,
auprès de la tombe de l'enfant

 

Eino Viljami PANULA,
photographié le 23 Mars 1912
© Encyclopedia Titanica

 

Enfant, Magda avait entendu sa grand-mère raconter qu'elle avait la vision de Maija Panula apparaîssant dans la maison familiale après le départ du Titanic. Un survivant finlandais avait aussi fait un récit déchirant à sa grand-mère: on avait proposé à Maija une place dans l'un des canots de sauvetage. "Mais elle a refusé de quitter le navire avec seulement Eino, alors que ses 4 autres enfants étaient encore dans une autre partie du bateau".

Elle ajouta que les conclusions des chercheurs avaient clos l'histoire de Maija et Eino. Comme on lui demandait si elle souhaitait que le cercueil de Eino revienne en Finlande, elle déclara: "Certainement pas" et ajouta: "Nous ne voulons pas qu'il soit rapatrié en Finlande mais qu'il retourne auprès des gens de Halifax qui ont pris soin de lui pendant tout ce temps".
Les restes exhumés de Eino seront à nouveau inhumés dans la tombe initiale.

Magda Schleifer, accompagnée de sa fille, son gendre et sa petite-fille, se rendit à Halifax quelques jours avant l'annonce officielle, pour participer au tournage du film documentaire "Titanic's Ghosts" ("Les Fantômes du Titanic") de la série "Secrets of the Dead" ("Secrets des Morts") destiné à la chaîne de télévision américaine PBS et ayant pour sujet les recherches en identification , mais aussi pour voir le lieu de sa sépulture et s'y recueillir.

Elle déclara que, tandis qu'elle était agenouillée devant la pierre tombale où l'enfant est enterré, elle éprouva la satisfaction que le mystère soit enfin terminé. "C'est un instant très émouvant, on a pris soin de cet enfant ici", dit-elle, faisant allusion aux soins méticuleux apportés au cimetière. "Nous avons du mal à croire qu'on en a pris soin pendant 90 ans après l'accident et que nous apprenons maintenant que nous sommes sa famille".

Magda Schleifer déclara que la stèle ne devrait pas être changée, mais que le nom du petit garçon pourrait être ajouté.

 


Magda Schleifer se recueille sur la tombe de l'enfant

 

La science ayant permis de donner une solution à ce long mystère, grâce à la participation de plus de 50 scientifiques, généalogistes et chercheurs, le Dr. Ryan Parr, qui coordonna leur travail, déclara: "L'enfant inconnu est désormais connu, identifié et rendu à sa famille".

 Les petits souliers

En 2002, Earle Northover, petit-fils de Clarence Northover, Sergent des services de police de Halifax en 1912, contacta le Musée Maritime de l'Atlantique de Halifax et se proposa d'offrir au Musée une paire de souliers d'enfant que son grand-père avait conservée pendant 6 ans et jusqu'à sa retraite en 1918, dans le tiroir de son bureau lorsque les corps des victimes du naufrage du Titanic et leurs effets personnels avaient ramenés à Halifax par le Mackay-Bennett.
Le Musée recevant de nombreuses propositions de ce type, les preuves de l'appartenance de ces souliers à une victime du Titanic devaient cependant être apportées.

A l'époque, de nombreux vêtements (près de 200 piles soigneusement attachées par le personnel de la compagnie du Mackay-Bennett) portés par les victimes retrouvées furent brûlés, de crainte que les pilleurs de reliques ne s'en emparent. Il en fut ainsi pour la petite victime N° 4 baptisée "l'enfant inconnu" pour laquelle Clarence Northover ne conserva que les souliers, dans l'espoir que sa famille vienne les demander. On sait que ce ne fut pas le cas mais, malgré tout, Northover les garda.

Comment prouver que la paire de souliers appartenait bien à "l'enfant inconnu" ?
La liste des effets qu'il portait inclut des souliers marron. L'analyse des souliers proposés par Earle Northover et effectuée grâce au rapport du Coroner de l'époque, de catalogues de chaussures et avec l'aide d'historiens de la chaussure, a conduit aux caractéristiques suivantes:

Date de fabrication: vers 1910
Lieu de fabrication: inconnu, probablement Angleterre
Marque de fabricant: aucune
Modèle: souliers pour enfant
Matière: cuir, piqué à la machine
Couleur: rouille
Semelles: fixées par de petites semences
Talons: fixés par de plus grosses semences
Lanières: 3 réunies en une seule
Trous pour boutons: 3 sur chaque soulier
Boutons présents: 1 sur chaque soulier
Dimensions extérieures: longueur 14,5 cm, largeur 6 cm, hauteur 5 cm
Dimensions intérieures: longueur 12,5 cm, largeur 4,5 cm
Largeur: 6 cm
Usure: moyenne
Marques sur la semelle gauche: écrit au crayon "Bottines de victime du SS Titanic portées par le seul bébé noyé"
Marques sur la semelle droite: écrit au marqueur "SS Titanic disparu ?"

Ces caractéristiques montrent bien que ce type de souliers appartenait effectivement à un jeune enfant dont l'âge correspondait avec celui de la petite victime, qu'il avait vécu à l'époque du Titanic, et qu'il était supposé être une victime de son naufrage. Bien que l'enfant inconnu fut le seul enfant en bas âge retrouvé par le Mackay-Bennett, ces éléments furent considérés comme insuffisants comme preuves d'authenticité. On parvint alors à démontrer, d'une part, que Clarence Northover faisait bien partie de l'équipe qui gardait la morgue lorsque les victimes furent ramenées à Halifax et que leurs effets furent ôtés et répertoriés, et d'autre part, que le cuir des souliers contenait des microbes présents dans l'eau salée.

La preuve était ainsi faite que les souliers appartenaient à "l'enfant inconnu". Depuis Juillet 2005, ils sont exposés au Musée Maritime de l'Atlantique, à Halifax.

 


Les souliers de "l'enfant inconnu"

 

Le don fait par Earle Northover au Musée Maritime de l'Atlantique est un geste très profond, empreint de respect et d'honnêteté, lorsque l'on sait que des objets récupérés sur le Titanic se vendent aux enchères et que certains atteignent plusieurs dizaines de milliers de dollars.
Les petits souliers sont exposés à côté des gants d'un millionnaire lui aussi victime du naufrage, Charles Hays,
Président de la compagnie canadienne Grand Trunk Pacific Railway, afin de se souvenir qu'un échantillon de l'humanité a péri dans le naufrage.

 Ultime (?) rebondissement

Fin Juillet 2007, le Dr. Ryan Parr et Alan Ruffman annoncèrent que les conclusions émises par les chercheurs en 2002 étaient erronées et qu'ils avaient aujourd'hui abouti à une nouvelle conclusion: l'enfant inconnu n'est pas le petit finlandais Eino Viljami Panula mais le petit anglais Sydney Leslie Goodwin.
Les raisons de cette volte-face sont les suivantes:

On considère donc désormais que Sydney Leslie Goodwin est "l'enfant inconnu" dont les petits souliers sont exposés au Musée Maritime de l'Atlantique, à Halifax.

 

Sydney Leslie GOODWIN

 

L'enfant inconnu, victime du naufrage du Titanic, peut-il être considéré comme définitivement identifié ?
L'historique rocambolesque de son identification permet d'en douter.

Qui sait si, pendant les 5 jours de la traversée, la mère de Sydney Goodwin n'aurait pas offert à la mère de Eino Panula des souliers devenus trop petits pour son fils ? ...

 

 

La famille Rice

 

Margaret Norton, née à Athlone, comté de Westmeath, Irlande, le 6 Octobre 1872, avait émigré au Canada avec sa famille, dans son jeune âge.
Elle y rencontra William Rice et retourna en Irlande pour l'épouser, à l'âge de 19 ans.
William Rice était employé comme agent de transport dans la compagnie de chemins de fer Grand Trunk Railway de Montréal.
Ils perdirent leur premier enfant qui décéda d'un étouffement avec une tétine et décidèrent alors de revenir au Canada, à Montréal, où ils s'installèrent.

En 1909, la famille partit pour Spokane, état de Washington, aux États-Unis. William Rice y travailla comme machiniste à la compagnie de chemins de fer Great Northern Railway.
Lorsque le dernier enfant de la famille, Eugene Rice, naquit à Spokane le 13 Octobre 1909, la famille se trouvait composée de Albert (1902), George Hugh (1902), Frederick "Eric" Thomas (1905), Arthur (1908).

En 1910, alors que Margaret Rice semblait s'être remise du décès de son aîné, son époux, William, décéda, victime d'un accident de chemin de fer au cours de son travail.
Grâce à la somme 300 £ versée par les compagnies d'assurance, Margaret revint peu après en Irlande et rejoignit Athlone avec ses enfants.

En 1912, elle décida de repartir une nouvelle fois afin de mener une nouvelle vie à Spokane, aux États-Unis.
Devant initialement partir pour l'Amérique environ un mois après le départ du
Titanic, une voisine la persuada de partir plus tôt afin de pouvoir l'aider, elle et les enfants.
Le 11 Avril 1912, elle embarqua sur le
Titanic à Queenstown, comme passagère de 3ème Classe, accompagnée de ses 5 enfants: Albert (10 ans), George Hugh (9 ans), Frederick "Eric" Thomas (7 ans), Arthur (4 ans) et Eugene Francis (2 ans 1/2).

Après la collision et pendant la confusion qui régnait à bord du navire au moment du naufrage, la passagère irlandaise de 3ème Classe, Bertha Mulvihill, qui réussira à s'échapper, la vit dans le secteur des passagers de 3ème Classe. Elle se tenait assise et avait sur elle le petit Eugene, 2 ans 1/2, tandis que les autres garçons s'agrippaient à sa robe. Livrée à elle-même, la famille Rice se trouva très certainement bloquée et ne put s'échapper. Tous trouvèrent la mort dans la catastrophe. Margaret Rice avait 39 ans.

 


Margaret RICE entourée de ses 5 enfants:
en haut: Albert, Arthur
en bas: George Hugh, Eugene Francis, Frederick "Eric" Thomas

 

Le corps de Margaret Rice fut retrouvé par le Mackay-Bennett.
En raison des grains du chapelet qu'elle portait sur elle, Margaret fut considérée comme étant de confession catholique et inhumée tombe N° 12 au cimetière du Mont des Oliviers, à Halifax.
Le corps fut formellement identifié le 25 Septembre 1912, grâce à la marque du magasin d'Athlone portée par ses chaussures, ainsi qu'à celle d'une boîte de pilules prescrite à Athlone le 9 Avril 1912, 2 jours avant le départ de Queenstown.

 


Certificat du pharmacien James Fleming, 12 Church Street à Athlone,
attestant la vente d'une boîte de pilules à Margaret Rice, le 9 Avril 1912

 

Les corps des 4 enfants aînés Albert, George Hugh, Frederick "Eric" Thomas et Arthur ne furent jamais retrouvés.
Quant au corps du petit Eugene, il fit l'objet d'un mystère qui dura près de 90 ans ...

 

  N° 12 - Femme - Âge estimé: 40 ans - Taille: 1 m 65 - Poids: 63 kg - Cheveux: noir grisonnant - Signes: fausse dent à la mâchoire supérieure - Vêtements: Manteau de velours noir; veste et jupe; cardigan bleu; tablier noir; bas et bottines noires avec marque "Parsons Sons, Athlone"- Effets: Alliance; un autre anneau; médaillon et photographie; un collier de jais et un de perles; broche en or dans un écrin; 3£ en or; 4£ en billets irlandais; broche en or; pendentifs d'oreilles unis en or; médaillon autour du cou marqué "B. V. M."; billet de 10£; boîte à pilules - Probablement 3ème Classe.
La tombe de Margaret RICE et la description du corps

 

Après le naufrage, le corps d'un enfant blond, âgé d'environ 2 ans, fut retrouvé par le Mackay-Bennett mais ne put être identifié.
Il fut inhumé dans la tombe N° 4 dite "de l'enfant inconnu" du cimetière de Fairview Lawn, à Halifax.
Dès le début et pendant longtemps, on pensa qu'il était très probable que cet enfant soit le petit Gösta Leonard Pålsson, 2 ans, passager suédois de 3
ème Classe qui voyageait avec sa mère Alma et ses 3 frère et soeurs.
Pourtant, la preuve formelle de l'identité de Gösta Leonard Pålsson ne fut jamais apportée.
Certains s'accordaient cependant à penser que l'enfant inconnu pouvait aussi être le petit Eugene Rice, 2 ans 1/2.

Il fallut attendre 90 ans pour que l'on découvre scientifiquement que l'identité de l'enfant n'est pas celle qui était communément admise, et qu'il ne s'agit pas non plus du petit Eugene Rice.

 

La famille Danbom

 

Ernst Gilbert Danbom, 34 ans, était fermier et recruteur d'émigrants à Stanton, dans l'Etat d'Iowa.
Le 6 Juin 1910, il avait épousé Anna Sigrid Maria Brogen, 28 ans, et tous deux étaient revenus en Suède où leur fils unique Gilbert était né, le 16 Novembre 1911.

Après un séjour de 22 mois en Suède, la famille Danbom embarqua sur le Titanic à Southampton comme passagers de 3ème Classe, en compagnie de la sœur d'Anna et de son mari, Alfrida et Anders Andersson, ainsi que de leurs 5 enfants.
Ernst Danbom, qui percevait une commission de la part de la White Star Line pour les émigrants qu'il recrutait, emporta une importante somme d'argent en quittant la Suède.
On raconta que la famille devait s'installer sur l'exploitation fruitière de Ernst à Turlock, en Californie.

Les familles Danbom et Andersson disparurent dans le naufrage.
Le corps de Ernst fut retrouvé par le navire câblier
Mackay-Bennett, ramené à Halifax puis conduit à Stanton le 3 Mai 1912 pour y être inhumé.
Les corps d'Anna et de son bébé Gilbert, âgé de 5 mois, s'ils furent retrouvés, ne furent jusqu'à présent jamais identifiés.

 

La famille Panula

 

Eino Viljami (William) Panula, 13 mois, né le 10 Mars 1911, était le dernier des 5 enfants du couple finlandais Juha (John) et Maija Emelia Panula, née Ketola.

La famille Panula avait déjà habité le Michigan, aux États-Unis, mais en 1910, elle était retournée vivre à Ylihärmä, en Finlande.
Les Panula avaient ensuite décidé d'émigrer en Amérique. Juha était parti seul pour travailler comme mineur à Coal Center, petite communauté située près de Pittsburg, en Pennsylvanie où il avait acheté une jolie maison qu'il restaurait dans l'attente de l'arrivée de sa famille.
En Février 1912, Maija Panula, 41 ans, vendit la ferme familiale de Ylihärmä à son beau-frère.

 

Maija et Juha Panula,
le 14 Février 1892,
jour de leur mariage

 

Maria et ses 5 garçons: Ernesti, 16 ans, Jaako, 15 ans, Juha, 7 ans, Urho, 2 ans, et le petit Eino, 13 mois, embarquèrent sur le Titanic à Southampton comme passagers de 3ème Classe.
Elle emportait avec elle la plus grande partie de l'argent provenant de la vente de la ferme et avait acheté les billets de chemin de fer pour se rendre à Coal Center.
Les deux aînés voyageaient dans une cabine située à la proue tandis que Maria et les trois plus jeunes partageaient une cabine avec Anna Turja, jeune finlandaise âgée de 18 ans.

Anna Turja, qui échappa au naufrage, raconta que, la nuit du naufrage, l'un des fils aînés de Maria vint de la proue pour les réveiller. Il leur dit "qu'ils devaient se presser de se lever car le bateau coulait, sinon ils se retrouveraient au fond de l'océan".
Plus tard, au milieu de la confusion, Maria perdit plusieurs des garçons. Anna Turja la retrouva effondrée sur le pont. "En pleurant, elle lui raconta que l'un des enfants avait failli se noyer en Finlande. Allaient-ils tous mourir noyés maintenant ?".
Maija Panula et ses 5 enfants périrent dans la catastrophe.
Juha Panula dut attendre une semaine avant d'avoir la confirmation que sa famille se trouvait à bord du
Titanic.

 

La famille Goodwin

 

Sydney Leslie Goodwin, 19 mois, né le 9 Septembre 1910, était le dernier des 6 enfants du couple anglais Frederick Joseph et Augusta Goodwin, née Tyler.

Frederick Joseph Goodwin, 42 ans, ingénieur électricien, et son épouse Augusta, 43 ans, habitaient Fulham, Angleterre. Ils avaient 6 enfants: Lillian, 16 ans, Charles, 14 ans, William, 11 ans, Jessie, 10 ans, Harold, 9 ans, et le petit Sydney Leslie.

Thomas Goodwin, frère de Frederick, qui s'était installé près des Chutes du Niagara, New York, l'avait informé de la prochaine ouverture d'une grande centrale électrique. La famille Goodwin décida alors de partir pour l'Amérique. Après avoir vendu leur maison de Fulham, les Goodwin fit un bref arrêt à Marcham et réservèrent leurs billets au départ de Southampton à bord d'un petit paquebot mais, en raison de la grève du charbon, leur passage fut annulé et ils furent transférés sur le Titanic. Avec quelques économies, ils voyagèrent en 3ème classe.
Tous périrent dans le naufrage.

Le corps du petit Sydney ne fut identifié que 95 ans après la catastrophe comme étant celui de l'enfant inconnu du cimetière de Fairview, à Halifax. Les autres corps, s'ils furent retrouvés, ne furent jamais identifiés.

 

La famille Goodwin (Sydney n'est pas présent)

 

Le R.M.S. Titanic

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